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22 mai 2013 - Lex Weber: le TF se prononce

Mercredi 22 mai 2013, le Tribunal fédéral s'est prononcé sur quelques affaires concernant l'initiative populaire sur les résidences secondaires. La première question portait sur l'applicabilité directe du texte, ou plus prosaïquement sur le caractère clair et précis du terme "résidence secondaire", la seconde sur la qualité pour agir de l'association Helvetia Nostra. 

 

J'ai pris la peine d'aller passer ma journée à la tribune du Tribunal fédéral pour comprendre un peu mieux les conséquences. Mes réactions. 

23 mai 2013 - Lex Weber: la messe est dite

Publié dans l'AGEFI le 23 mai 2013.

La messe est dite, la saga politico-judiciaire des résidences secondaires s’achève.

Le Tribunal fédéral a ainsi estimé la Lex Weber directement applicable. Selon les propres termes des juges, la notion de résidence secondaire ne constitue pas un « alien » du droit fédéral. Les définitions établies par les cantons et les offices fédéraux suffisent. Peu importe les promesses des initiants, peu importe que l’hôtellerie pourrait bien en pâtir ; est une résidence secondaire tout ce qui n’est pas principal, la messe est dite.

Deuxième jugement, la qualité pour recourir d’Helvetia Nostra est admise. Contrairement à ce que prévoyait le droit et la jurisprudence fédérale jusqu’ici, les organisations sont désormais légitimées à recourir contre les petits projets en zone à bâtir. A juste titre mais esseulé, un des juges a estimé la décision plus politique que juridique. Camouflet pour le parlement comme pour les Tribunaux cantonaux, notre Cour suprême a élargi encore un peu le droit de recours des organisations, sans base légale et sans contrôle démocratique. Une fois de plus, la messe est dite.

Cet après-midi, j’ai assisté en direct au massacre immédiat de quelques milliers de postes de travail. Quel que soit notre opinion sur la question, d’un trait de plume, le Tribunal fédéral a vidé le carnet de commande d’un grand nombre de sociétés. Il y avait deux options pour appliquer l’initiative : la pente douce ou le précipice. La Cour a choisi de pousser des centaines d’entreprises de construction dans le ravin. Le 11 mars 2012, je reste convaincu qu’une majorité populaire s’attendait à une application un peu plus douce de l’initiative. Il n’y a malheureusement plus rien à faire, là encore, la messe est dite.

Il n’existe plus de voie de secours pour ceux qui vivaient de la construction de résidences secondaires, ils ne bénéficieront pas d’un temps d’adaptation, pas de seconde chance. Qu’on le veuille ou non, le Valais et les cantons alpins en général doivent désormais s’adapter à la nouvelle donne.

Que faire? Il est urgent que le parlement fédéral édicte une loi d’application solide : les propos tenus hier par les juges fédéraux laissent penser que l’ordonnance d’application pourrait bien terminer à la poubelle lors d’un prochain recours, plongeant encore plus les milieux du bâtiment dans l’insécurité juridique. Il nous reste à mieux utiliser le patrimoine bâti. Pousser à la location, améliorer la qualité du service. En la matière, l’Etat est faible, c’est au secteur touristique de se réveiller.

La messe me laisse encore un dernier goût d’amertume. A l’exception notoire du Conseiller aux Etats Immoberdorf, j’étais le seul élu valaisan à assister à cette séance du Tribunal fédéral. Aucun collègue pour répondre aux médias. Aucun autre député pour écouter les arguments des juges fédéraux. Nos cinq Conseillers d’Etat d’ordinaire si prompts à inaugurer le moindre passage piéton, ont brillé par leur absence. Franz Weber, Pierre Chiffelle et Philippe Roch ont obtenu gain de cause devant le Tribunal fédéral, mais aussi aux yeux du public par leur seule présence. Beau joueur, il convient de les féliciter. Et de se remettre encore une fois en question.

24 mai 2013 - Lex Weber: un peu de sérieux !

Je m’étonne des gesticulations de certains élus démocrates-chrétiens suite aux jugements du Tribunal fédéral concernant la Lex Weber. L’idée d’une contre-initiative est un gadget politique grossier servant à camoufler la responsabilité de leur parti dans les débâcles à répétition que connaît notre canton. Loin de moi l’idée d’affirmer qu’ils sont seuls responsables, mais faire profil bas s’impose un peu en l’espèce. D’autres questions beaucoup plus sérieuses se posent aujourd’hui que les discours de cantine visant à « quitter la Suisse » ou à ne pas appliquer le droit fédéral.

La presse fait état depuis deux jours des opinions avisées des élus démocrates-chrétiens sur la suite à donner aux jugements du TF. Deux en particulier évoquent la nécessité de lancer une « contre-initiative » pour contrecarrer les effets négatifs de l’interdiction de la construction de résidences secondaires. Il s’avère qu’entre le lancement d’une initiative, la récolte de signatures, le message du Conseil fédéral, la prise de position des chambres fédérales et le vote populaire, on prévoit généralement un délai minimum de cinq ans.

Une telle solution est totalement farfelue. Les entrepreneurs qui vivent aujourd’hui des résidences secondaires ne peuvent certainement pas attendre des années avant de savoir sur quel pied danser. D’ici à l’éventuelle votation de la contre-initiative, les sociétés qui ont aujourd’hui pour fonds de commerce la construction de tels objets auront disparu ou se seront reconverties. Faire miroiter un possible retour en arrière est aussi indigne qu’irresponsable.

Si les théoriciens d’aujourd’hui avaient été présents au Tribunal fédéral mercredi, ils auraient entendu un discours beaucoup plus alarmant: en l’état actuel, la Cour fédérale cassera très probablement en tout ou en partie l’ordonnance sur les résidences secondaires, annulant d’un coup tous les permis délivrés depuis le 1er janvier 2013 pour la parahôtellerie. Cette situation catastrophique a pour conséquence une insécurité juridique inacceptable qui doit être résolue par l’introduction immédiate dans une loi fédérale urgente (protégée par l’art. 190 Cst.) du contenu de l’ordonnance.

La construction de résidences secondaires telle qu’elle s’est déroulée pendant des décennies est terminée, qu’on le veuille ou non. Il n’est plus temps de jouer les fort-à-bras, mais de permettre aux entrepreneurs qui subissent de plein fouet la nouvelle législation de se redresser sur des bases juridiques solides et non pas sur des slogans de cantine.

D’une manière générale, je regrette les gesticulations grossières d’un PDC cherchant à camoufler sa responsabilité dans les désastres qu’a connu le Valais les deux dernières années. Quitter la Suisse, lancer une contre-initiative, ne pas appliquer le droit fédéral : autant de propositions sans lendemain destinées à masquer maladroitement le désarroi d’un parti cantonal qui n’est plus écouté par sa section fédérale.

Pour mémoire, en ce qui concerne la Lex Weber, les interventions publiques de certains ont, de l’avis général, coulé un peu plus la campagne des opposants à Franz Weber. C’est une Conseillère fédérale PDC qui a annoncé le soir du 11 mars 2012 que l’initiative devait être directement appliquée. Enfin, ce sont deux juges fédéraux PDC qui ont fait pencher la balance mardi pour donner raison sur toute la ligne à Helvetia Nostra. Rappelons encore que c’est bien le groupe parlementaire PDC qui permis l’adoption par le parlement de la révision de la LAT et que le PDC suisse s’est engagé pour le Oui sur cet objet. La moindre des décences serait aujourd’hui de faire profil bas plutôt qu’annoncer un feu d’artifice de mesures rocambolesques.

J’admets ma part de responsabilité dans l’échec de la campagne de votation de mars 2012. Je n’affirme pas que le PLR a tout fait juste, nous avons commis des erreurs, comme tout le monde. Je pense seulement qu’il est enfin temps de prendre acte de la situation que nous connaissons et de chercher des solutions constructrices et salvatrices. Il en va de la responsabilité des élus et de la dignité de la classe politique.