Un raz-de-marée Ebola
Écrit par Adrienne Blomberg, membre du conseil international du Réseau Michée, vivant et travaillant au Liberia avec son mari Winston. Adrienne était auparavant directrice de Siam Care en Thaïlande.
Ebola est partout et influence chaque aspect de la vie. C’est ce dont on parle toute la journée, ce à quoi on pense, ce dont on entend parler non-stop à la radio, ce qui nous préoccupe, ce autour de quoi tournent nos projets, ce dont les journaux sont pleins. C’est ce dont parlent nos prières et nos demandes, ce qui fait pleurer les personnes endeuillées, ce dont les nouveaux orphelins connaissent tout par cœur, ce qui fait l’objet des mythes et des légendes... En bref, c’est ce qui domine notre vie en ce moment.
Le Liberia est un pays qui passe par un temps de traumatisme terrible et ce traumatisme, même une fois terminé, demandera beaucoup, et je veux dire BEAUCOUP de temps avant que nous ne retombions sur nos pieds.
Ebola a touché tous les aspect de la société : économie, soins médicaux, éducation, vie de famille, vie communautaire, travail / emploi, alimentation, traditions, religion... absolument tout. Rien n’est normal, rien n’est automatique, nous pesons tout ce que nous faisons :
- non, je ne vais pas essayer cette chemise même si je voudrais l’acheter, qui sait qui l’a essayée avant moi
- aie, je voulais remettre votre boucle d’oreille en place, mais je ne dois pas toucher
- vous transpirez, est-ce seulement la chaleur ou êtes-vous malade ?
- Oh mon petit ami et voisin, merci de venir/courir pour m’embrasser, mais arrête-toi là où tu es, pas d’embrassade
- oui, j’aimerais que vous veniez me rendre visite, mais attendons après Ebola
... Et ainsi de suite.
Je repensais à l’époque du tsunami qui a frappé la Thaïlande (et l’Asie du Sud-est) en 2004. Trois vagues ont frappé, l’une après l’autre. Après la première, tout le monde était choqué, mais avant de pouvoir vraiment regarder alentour et prendre la mesure de ce qui venait d’arriver, une seconde vague
a déferlé, il ne s’était écoulé que quelques secondes, quelques minutes peut-être, mais cela a causé des ravages. Ceux qui avaient survécu étaient hagards, ils appelaient des êtres aimés, contemplaient les destructions, commençaient à enjamber les troncs à terre, les toitures... ensuite une troisième vague
a frappé. Alors ils ont décidé de rester là où ils étaient si l’endroit était plus ou moins sûr, qui pouvait dire ce qui allait encore arriver... ! Les équipes de sauveteurs ont découvert des gens « figés » sur les collines et les montagnes, paralysés par la peur, une grande partie de la nation a été profondément traumatisée, ensuite la reconstruction a commencé. Je ne me rappelle pas bien combien de temps a duré le tsunami, en tous cas moins d’une matinée, mais je me rappelle combien de temps il a fallu pour reconstruire après la dévastation. Reconstruire les routes et les bâtiments était une chose, mais reconstruire les moyens de subsistance en était une autre ; et reconstruire les vies a été encore une toute autre histoire.
Au Liberia, les vagues d’Ebola ont continué de déferler sur le pays, elles viennent de toutes les directions, parfois inattendues, et nous devons être constamment sur le qui-vive. Nous ne pouvons plus fonctionner en mode automatique, nous ne serrons plus de mains, nous n’embrassons plus pour réconforter une veuve, nous n’aidons plus spontanément une personne malade etc. etc.
Combien faudra-t-il de temps pour restaurer toutes les conséquences ? Aujourd’hui, nous n’imaginons pas même la restauration, aujourd’hui tout ce à quoi nous pensons, c’est à
arrêter les vagues, inverser le courant et ce n’est pas chose facile. Je crois encore que c’est possible, mais il faut beaucoup de travail sur tous les fronts. Il faut s’occuper des mythes et des croyances superstitieuses, il faut confronter le déni et le changement de comportement et lutter, il faut mettre un terme aux pratiques traditionnelles et religieuses néfastes transmises de génération en génération, il faut ouvrir davantage de centres de traitement, il faudra mettre à disposition davantage de soutien (alimentaire) pour ces contacts qui se mettent eux-mêmes en quarantaine... et ici aussi la liste est sans fin.
Oh Seigneur aie pitié de ce pays !
Prenons position avec Adrienne et Winston qui servent au Liberia et prions pour tous ceux qui sont engagés dans la réponse et la survie à cette terrible épidémie. Engageons-nous à intercéder chaque jour et à être prêts à agir selon ce que Dieu nous indiquera.
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Women of Hope International a conçu un calendrier de prière couvrant les 21 Jours de Prière
pour ebola, du 11 au 31 octobre. Veuillez le télécharger (en anglais), utilisez et partagez ce document avec vos collègues.
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