Chers lecteurs, chères lectrices,

Combien vous coûtera la rentrée scolaire cette année? Les tribunaux québécois ont certes rappelé certaines commissions scolaires à l’ordre, l’an dernier, les obligeant à rembourser des frais exigés aux parents, mais cela ne les a pas éliminés, tant s’en faut. Et ces 35$ par-ci, 75$ par-là, voire bien davantage, créent une école à deux vitesses, écrit Sue Winton, professeure à l’Université York. Payer est devenu la norme pour accéder à certains programmes ou activités parascolaires, déplore-t-elle. Payer plus pour en avoir davantage «est l'une des nombreuses idées du secteur privé qui sont devenues courantes dans les écoles publiques.»

Toujours à l’école, les enfants y apprennent de moins en moins à écrire en lettres attachées, déplore Hetty Roessingh, de l’Université de Calgary. Et pourtant! Développer sa maîtrise de l’écriture manuscrite joue un rôle important dans l’apprentissage. « Au-delà de la nostalgie pour l’âge prénumérique, il y a de bonnes raisons de réintroduire l’écriture cursive à l’école. Ceux qui apprennent à épeler et à écrire de manière fluide seront mieux outillés pour s’exprimer avec confiance et surmonter les petits irritants, comme la perte de courant d’un objet numérique.»

L’environnement a été une fois de plus cette semaine au cœur de l’actualité. Il y a d’abord ces incendies. Ceux qui ravagent l'Amazonie ne sont pas naturels du tout, écrit Jos Barlow, de l’Université Lancaster. Dans cette forêt tropicale ultra humide, les espèces ne se sont pas adaptées au feu - et même un modeste incendie peut tuer la moitié des arbres et décimer la faune. Les causes de la catastrophe actuelle sont multiples, mais s’attaquer à la déforestation demeure prioritaire. Sauf qu'il y a le président Jair Bolsonaro… Sous sa gouvernance, les fonds alloués à l’agence de protection de l’environnement brésilienne ont été amputés de 95 pour cent.

Et il y a les feux qui ravagent l’Afrique. La NASA a lancé l’alarme cette semaine : pendant que la planète s’émeut des incendies en Amazonie, ceux-là semblent plus importants encore. En effet, écrit Colin Beale, de l’Université York, la savane africaine flambe, mais cela est tout à fait normal à cette saison, et ce… depuis un million d’années. C’est ainsi que nos ancêtres lointains, les hominidés, et les actuels éleveurs gèrent les savanes où leurs animaux vont pâturer. « Les animaux et les plantes de la savane sont adaptés non seulement pour survivre à ces incendies, mais certains en ont besoin », écrit Beale. Le CO₂ libéré par ces feux est réabsorbé par la croissance de nouvelles herbes l'année suivante. «Il semble clair que ce qui se passe en Amazonie est la vraie histoire, alors que l'indignation face aux incendies en Afrique n'est peut-être juste qu'une diversion.»

Autre phénomène – pas tant - naturel : les inondations. Celles du printemps, au Québec, sont encore dans tous les esprits, alors qu’on vient de démolir des maisons situées en zone inondable à Sainte-Marthe-sur-le-Lac. Il existe des approches d’aménagement du territoire qui favorisent une meilleure résilience et qui pourraient être intégrées dans les politiques publiques au Québec, écrivent Pascale Biron, de l’Université Concordia, et Isabelle Thomas, de l’Université de Montréal, qui offrent des exemples probants venus d’Angleterre, de France et des Pays-Bas. «Il faut accepter de vivre avec l’eau et travailler avec la nature plutôt que de se battre contre elle et d’essayer de la maitriser.»

À l’approche des élections fédérales, voici une enquête qui inquiète : après les meurtres à la mosquée de Québec, des trolls russes ont répandu de fausses nouvelles sur Twitter, révèlent les professeurs Yasmin Jiwani, de l’Université Concordia, et Ahmed Al-Rawi, de l’Université Simon-Fraser. «Les Russes ont déjà utilisé des techniques similaires pour semer la confusion et la dissension dans d’autres pays. On peut raisonnablement supposer que la même chose se produira à l’approche de l’élection d’octobre prochain.»

Il n’y a pas assez de femmes, de minorités visibles, de personnes handicapées ou d’autochtones en recherche au Canada, déplore Malinda S. Smith, de l’Université d’Alberta. Elle prône une plus grande diversité, notamment dans les Chaires de recherche, et répond aux détracteurs des programmes d’équité : «les pratiques favorisant la diversité et l’inclusion permettent d’assurer que les obstacles, les stéréotypes et la stigmatisation n’empêchent pas l’étendue du talent en recherche et contribuent à l’avancement du savoir». 

Avez-vous déjà été pris d’un fou rire dans un salon mortuaire? Si oui, vous deviez en être gênés ce qui, peut-être, a accentué votre état. Vous transgressiez une règle. Chez les Batek de Malaisie, c'est rire des batraciens, des petits fruits, des fleurs ou de certains insectes qui est proscrit! Pourtant, Alice Rudge, de UCL, a assisté au fou rire incontrôlable d’une Batek devant le coassement impromptu d’une grenouille. Elle transgressait un tabou et le savait! «En fait, le rire peut être particulièrement agréable lorsque c'est interdit», écrit-elle. Le rire est un outil de socialisation et de transmission de valeurs. «Quand il s'agit de ce que nous trouvons drôle, nous pouvons soit suivre les règles, soit simplement en rire. Mais quoi qu'il en soit, nous apprenons le bien et le mal.»

Bonne lecture !

Martine Turenne

Éditrice, La Conversation Canada

À la une

De nombreux parents se sentent obligés de payer des frais de scolarité, même s'ils estiment qu'ils ne devraient pas avoir à le faire. Shutterstock

Les frais scolaires minent l'égalité des chances dans le système public

Sue Winton, York University, Canada

Les frais scolaires parfois exorbitants exigés aux parents créent une école à deux vitesses, une situation inéquitable pour les plus démunis.

C’est un choc pour les vieilles générations de s’apercevoir que certains jeunes sont incapables de lire une note écrite à la main. Shutterstock

Voici pourquoi il faut réintroduire l’écriture cursive à l’école

Hetty Roessingh, University of Calgary

Développer sa maîtrise de l’écriture manuscrite, de façon à ce qu’elle devienne automatique, joue un rôle important dans la littératie.

Les espèces des forêts tropicales n'ont pas évolué avec le feu - et même un feu de forêt de faible intensité peut tuer la moitié des arbres. Adam Ronan

Incendies en Amazonie : pourquoi causent-ils tant de dégâts et comment faire pour les arrêter?

Jos Barlow, Lancaster University; Alexander C. Lees, Manchester Metropolitan University

Les espèces des forêts tropicales n'ont pas évolué avec le feu - et même un feu de forêt de faible intensité peut tuer la moitié des arbres.

Un éléphant se met à l'abri des feux qui ravagent la savane. Oui il y a plus d'incendies en Afrique qu'au Brésil. Mais contrairement à l'Amazonie, la savane africaine a évolué pour repousser rapidement. Shutterstock

Les prairies africaines sont censées brûler - pas les forêts d'Amazonie. Ne détournons pas l'attention!

Colin Beale, University of York

Oui, il y a plus d'incendies en Afrique qu'au Brésil. Mais contrairement à l'Amazonie, la savane africaine a évolué pour repousser rapidement.

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Mieux vivre avec l'eau, pour être plus résilient face aux inondations

Pascale Biron, Concordia University; Isabelle Thomas, Université de Montréal

Il faut accepter de vivre avec l’eau et travailler avec la nature plutôt que de se battre contre elle et d’essayer de la maitriser.

Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, le 14 mars 2018. Un examen de l'activité de Twitter après les meurtres à la mosquée de Québec révèle que des trolls russes ont travaillé pour répandre de fausses nouvelles. La Presse Canadienne/Justin Tang

Des trolls russes diffusent des fausses nouvelles sur Twitter à l’approche des élections canadiennes

Ahmed Al-Rawi, Simon Fraser University; Yasmin Jiwani, Concordia University

Un examen de l'activité de Twitter après les meurtres à la mosquée de Québec révèle que des trolls russes ont travaillé pour répandre de fausses nouvelles.

file df h. Shutterstock

Pourquoi nous rions au pire moment… et que c'est encore plus drôle!

Alice Rudge, UCL

Une étude sur les chasseurs-cueilleurs Batek de Malaisie montre comment le rire peut façonner nos valeurs éthiques et nous apprendre à définir le bien et le mal.