Église et État, religion et politique
Dans nos discussions sur la mission intégrale, nous devons réfléchir à la séparation entre l'Église et l'État, la religion et la politique. En Europe, la presse rebondit sur la peur que l'afflux de réfugiés pourrait menacer les « valeurs chrétiennes » sur lesquelles sont fondées beaucoup de pays européens. C'est une remarque plutôt curieuse quand, simultanément, il y a la demande d'une sécularisation de la société, exigeant que l'expression de la foi soit écartée de l'espace public et de la politique pour rester cantonnée à la sphère privée.
Il est important de ne pas confondre la séparation de l'Église et de l'État (de même que de la synagogue et de l'État, de la mosquée et de l'État, ou du temple et de l'État) avec la séparation de la religion et de la politique.
Chaque nation est composée de citoyens qui ont des croyances différentes, sont adhérents de religions différentes ou d'aucune. Chaque personne exprime ses préoccupations en matière de vie publique, questions communautaires, services sociaux, décisions économiques et politiques, en fonction de ses croyances (oui, même ceux qui se déclarent sans croyance ont un cadre - p.ex. l'humanisme - dans lequel ils pensent les sujets et problèmes de la vie en communauté). L'expression de chaque opinion est importante, c'est même un droit (Articles 18 et 19 de la Déclaration universelle des droits de
l'homme).Chaque personne de foi ou de non foi a le droit de s'exprimer et, en tant que chrétiens, nous devrions prendre position pour la justice et l'égalité en ce qui concerne ce droit d'expression. Ainsi donc, il est impossible de dissocier la religion de la politique, puisque ce que l'ont croit influe sur ce que l'on défend et ce pour quoi on travaille. À Michée, notre vision, c’est de voir des communautés vivant la vie dans toute sa plénitude, délivrées de l’extrême pauvreté, des injustices et des conflits. Cette vision est enracinée dans les Écritures, et Michée 6.8 nous appelle à faire ce que Dieu attend de nous. Ma foi et mon obéissance aux Écritures influent directement sur ma politique.
Sur cette base, nous sommes appelés à faire des disciples de toutes les nations. Il nous faut donc proclamer la vérité sur la place publique, proclamer la vérité face aux puissants et entre nous, de manière à influencer positivement des décisions prises pour notre nation qui nous acheminent vers le shalom.
Le problème lorsqu'une religion particulière est liée au pouvoir - l'État - est que cela fait pencher la balance vers cette religion, souvent au détriment des autres. De plus, cela pourrait déboucher sur le traitement dictatorial des autres, la persécution et la marginalisation.
Rechercher le bien commun de notre pays c’est défendre le droit d'expression de toutes les religions dans la sphère publique, voire de ne pas en avoir, et veiller à ce que notre voix y soit entendue. Nous devons trouver un moyen de discuter, débattre et afficher nos convictions dans la vie publique (dans la sphère publique) par une persuasion raisonnée, sans coercition, peur, pression, intimidation ou manipulation. C’est être capable de prendre des décisions fondées sur l'accès à l'information, la vérité, la recherche objective.
Jésus s'est exprimé sur la place publique. Il a interpellé les chefs politiques et religieux, il a pris la défense des pauvres et des marginalisés, guéri les malades et délivré les possédés. Sa foi a en tout point influencé sa politique et il l'a vécue publiquement. L'Église (ecclesia) est son héritage - un peuple appelé à prendre ses responsabilités.
Alors, comment s'engager ?
1) Changement de perspective : nous devons demander à Dieu de nous aider à aimer tous les membres de notre communauté, de notre pays - chacun en particulier. Aimer d'un amour plein d'humilité, empreint de compassion, miséricorde et justice.
2) Oser rêver et espérer : nous devons avoir l'audace, la conviction et la certitude que l'Évangile est puissance de libération, restauration, rédemption, transformation et plénitude pour chaque personne et pour notre pays.
3) Avoir le courage de vivre ce que nous croyons : aimer parce que nous sommes aimés, servir parce que nous avons été libérés, construire parce que nous sommes ambassadeurs du Roi, proclamer la vérité parce que ce que nous possédons est trop bon pour être gardé pour nous seuls - bref, c'est la vie pour tous.
Michée représente une communauté qui cherche à faire tout cela d’un commun accord sur la place publique. Nous appelons tous les croyants à être ce que Dieu nous a appelés à être. Seigneur, entends notre prière - envoie-nous.
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