En 1987, Nathalie Du Pasquier, jeune bordelaise installée à Milan, quitte le monde du design pour se consacrer à la peinture. Sa carrière au sein du groupe Memphis – groupe de designers et d’architectes cosmopolites réunis autour d’Ettore Sottsass –imprime résolument son nom dans la liste des auteurs de l’identité visuelle et graphique des années 80. A travers le groupe, Nathalie Du Pasquier contribue à l’élaboration d’une esthétique post-moderne qui se joue des codes et des dictats des « ismes » de la modernité.
A la dissolution de Memphis, Nathalie Du Pasquier entame un travail plus confidentiel. Elle commence une production picturale représentant les objets de son atelier, mis en scène dans des agencements précis et silencieux. Au début des années 2000, l’artiste construit des éléments géométriques en bois peint. Ces derniers se substituent, peu à peu, aux objets de son quotidien, pour devenir les sujets de ses compositions. Ces constructions prennent des formes diverses : elles sont parfois objets muraux, tables, étagères ou encore cabines. Si chacune fonctionne de manière indépendante, Nathalie Du Pasquier organise aussi ses pièces au sein d’installations : toiles et constructions s’articulent en dispositifs qui génèrent de nouveaux arrangements, autonomes.
Alors que ses compositions picturales sont figées par la nature de leur medium, les constructions de Nathalie Du Pasquier sont enclines à une perpétuelle évolution. L’artiste manipule, assemble, repeint et désolidarise les éléments qui constituent ses pièces, au gré de l’évolution de son travail. En transformant perpétuellement ses sculptures, elle produit non seulement un geste de désacralisation de l’objet d’art, mais elle se place aussi dans une éthique d’opposition au gaspillage.
Plus que jamais d’actualité, ces questions sociétales ont amené la mode à se tourner de nouveau vers l’esthétique des années 80. Depuis 2010, Nathalie Du Pasquier est sollicitée par des marques telles que Hay ou American Apparel pour rééditer ou créer des motifs dans l’esprit Memphis.
La culture matérielle est un concept – élaboré par l’anthropologie – qui s’intéresse aux interactions sociales à travers le prisme des objets. Utilisé en archéologie, il se focalise sur les infrastructures, les techniques et les productions matérielles qui caractérisent les organisations humaines. Avec Cultura materiale, Nathalie Du Pasquier propose une série de grandes constructions, des objets monochromes, assemblés et agencés dans l’espace de LiveInYourHead avec les étudiant-e-s de la HEAD – Genève. Ici, c’est l’espace d’exposition dans son ensemble qui est pensé comme une méta-peinture à laquelle le corps du spectateur est invité à se mesurer.
La Kunsthalle de Vienne consacrera une exposition rétrospective à l’œuvre de Nathalie Du Pasquier en 2016 (du 25 mai au 11 septembre), qui couvrira l’ensemble du spectre de ses pratiques, mettant en regard de ses peintures, dessins, maquettes, tapis, tissus, peintures murales et constructions.