Chères lectrices, et chers lecteurs

Il y a quelques jours, une de mes amies s’est envolée en direction d’Istanbul, avec sa sœur gravement malade. Celle-ci va y recevoir, durant trois mois, un traitement médical qui n’est pas offert au Canada. Peut-être va-t-il prolonger sa vie. Cette expédition coûtera cher. La famille a pris en charge les frais. Mais pour plusieurs familles dans la même situation, et surtout, pour celles dont les traitements à un proche sont encore plus onéreux, le sociofinancement devient la solution. Nous sommes tous sollicités via les médias sociaux, par des cas souvent uniques, et toujours déchirants. Le phénomène, nouveau, n’est pas sans conséquence, écrivent un groupe de chercheurs mené par le professeur de l’Université Simon Fraser, Jeremy Snyder. En plus de compromettre la vie privée, le sociofinancement profite davantage à ceux qui sont aisés, ont un réseau social étendu et une bonne connaissance des médias, écrit-il. Et il ne règle en rien les lacunes du système de santé. Car à la base de ces campagnes, il y a toujours le même problème : l’accès à un soin ou à un médicament.

Parler publiquement d'une agression sexuelle subie est-il toujours un geste libérateur? Est-ce la seule façon de s'affirmer comme « courageuse » ? La militante afro-américaine Tarana Burke a lancé un pavé dans la mare lors de la conférence Women Deliver qui s'est déroulée en juin à Vancouver. La doctorante en travail social de l’Université d’Ottawa, Kharoll-Ann Souffrant, y était. Elle analyse les propos de celle qui a inventé le terme MeToo, des années avant sa déferlante sur Twitter. « Tarana Burke ne dit pas qu'il ne faut jamais dénoncer la violence vécue. Elle ne condamne pas non plus celles qui décident de dénoncer publiquement. Elle avance plutôt qu'il y a du pouvoir dans le fait de choisir de quelle façon, à qui, et comment on dévoile une expérience traumatique aussi intime », écrit-elle.

Voici un conflit diplomatique qui a de graves répercussions au Canada. Depuis l’arrestation de la directrice financière de Huawei, la Chine multiplie les offensives. La dernière en date : l’interdiction de la viande canadienne en Chine, en raison de la découverte de certificats vétérinaires falsifiés et de résidus de ractopamine dans une cargaison de porc. Or, l’exportation des produits du bœuf et du porc en Chine est devenue une carte essentielle chez nos agriculteurs, explique Sylvanus Kwafu Afesorgbor, professeur à l’Université Guelph. Cela dit, si ces restrictions commerciales sont véritablement dues à des préoccupations sanitaires, il incombe au Canada d'améliorer ses exigences. Autrement, il faut régler ce contentieux au plus pressant, écrit-il, prônant par ailleurs une plus grande diversification des marchés d’exportation, pour moins dépendre des humeurs chinoises.

Parlant de diplomatie… Nous vous avons parlé la semaine dernière des relations détériorées entre le Canada et Cuba. Les visas ne sont plus disponibles à La Havane en raison de la réduction de moitié du personnel en place. Edward Shorter, professeur de psychiatrie à l’Université de Toronto, revient sur les raisons de cette affaire: le syndrome de La Havane qui afflige bon nombre de diplomates en place en 2016 et 2017. Ils ressentent des étourdissements, des acouphènes, invoquent des pertes de mémoire. Or, une théorie circule ces jours-ci comme quoi ces symptômes relèveraient de l’hystérie collective. Pourtant, des lésions cérébrales ont été décelées chez ces diplomates. Rien d’imaginaire là-dedans, écrit Shorter, qui rappelle que la médecine a longtemps qualité d'« hystériques » les maladies -comme la sclérose en plaques et l'endométriose - qu'elle ne comprenait pas. « Ne commettons plus cette erreur.»

Enfin, deux articles portant sur l’alimentation en provenance de nos partenaires. D’abord, The Conversation France s’attarde sur les vertus – bien réelles - de l’huile d’olive, et The Conversation UK nous explique la complexité du microbiome – ces milliards de gentils amis qui peuplent nos intestins. Ils nous sont uniques, c’est donc dire que notre réaction aux aliments est aussi très personnelle. Il n'y a donc pas une seule façon de manger qui fonctionne pour tout le monde, ni un seul type de régime, malgré ce qu’on peut vous dire… 

Bonne lecture !

Martine Turenne

Éditrice, La Conversation Canada

À la une

Les plateformes de financement participatif pourraient offrir des occasions de s’attaquer aux causes des inégalités dans les soins de santé en facilitant des partenariats entre campagnes de financement individuelles et organismes philanthropiques. Shutterstock

Le sociofinancement médical favorise les riches et met la vie privée en danger. Voici comment le rendre plus éthique

Jeremy Snyder, Simon Fraser University; Glenn Cohen, Harvard Kennedy School; Peter Chow White, Simon Fraser University; Valorie A. Crooks, Simon Fraser University

Le sociofinancement médical recueille des milliards de dollars chaque année - surtout pour ceux qui ont déjà de bons emplois et sont propriétaires de leur propre maison.

Tarana Burke à la conférence Women Deliver 2019. Selon la fondatrice de MeToo, il y a du pouvoir dans le fait de choisir à qui et comment on dévoile une agression sexuelle. https://www.flickr.com/photos/womendeliver/

Doit-on absolument dénoncer publiquement une agression sexuelle?

Kharoll-Ann Souffrant, University of Ottawa

Selon Tarana Burke, il y a du pouvoir dans le fait de choisir à qui et comment on dévoile une expérience traumatique aussi intime qu'une agression sexuelle.

Un taureau broute dans le pâturage d'une ferme près de Crémone, en Alberta, après que les Chinois aient annoncé l'interdiction d'importation de viande canadienne. Elle pourrait frapper durement le secteur agroalimentaire, dépendant des exportations vers la Chine. La Presse Canadienne/Jeff McIntosh

Viande canadienne interdite en Chine: une très mauvaise nouvelle pour le secteur agroalimentaire

Sylvanus Kwaku Afesorgbor, University of Guelph; Brendan McDougall, University of Guelph; Jiahao Zhu, University of Guelph

Les exportateurs canadiens de bœuf et de porc dépendent de plus en plus de la Chine. C'est pourquoi le différend diplomatique entre les deux pays est si inquiétant pour le secteur agroalimentaire.

Un neurotologiste a fait état de lésions cérébrales chez le tiers des diplomates américains et leurs familles atteints du syndrome de La Havane. Shutterstock

Le «syndrome de La Havane» qui afflige les diplomates n'est pas un cas d'hystérie collective

Edward Shorter, University of Toronto

La sclérose en plaques et l'endométriose ont longtemps été diagnostiquées comme de l'hystérie chez les femmes. Le même phénomène se produit chez les diplomates atteints du « syndrome de La Havane».

Il n'y a pas une seule façon de manger, ni un régime qui fonctionne pour tout le monde, malgré ce qu'on vous répète. Shutterstock

Vous êtes - vraiment - ce que vous mangez: voici pourquoi l'avenir de la nutrition sera très personnel

Tim Spector, King's College London

Il n'y a pas une seule façon de manger, ni un régime qui fonctionne pour tout le monde, malgré ce qu'on vous répète.

Un hôtel abandonné dans la ville ukrainienne de Pripyat, à quelques kilomètres de Tchernobyl. Shutterstock

Pourquoi les plantes ne meurent pas de cancer

Stuart Thompson, University of Westminster

La plupart de la vie végétale a survécu à la catastrophe nucléaire de Tchernobyl. Les plantes sont plus flexibles et s'adaptent beaucoup mieux que les animaux aux événements extérieurs.