Chères lectrices, chers lecteurs,

C'est le Salon du livre de Montréal et cette grande foire annuelle nous donne l’occasion de parler d’écriture. Elle peut être source de discrimination, comme le révèle cette recherche menée par la professeure en littérature Isabelle Boisclair, de l’Université de Sherbrooke, en collaboration avec l’Union des écrivaines et écrivains du Québec. Si autant d’hommes que de femmes soumettent des manuscrits, ces dernières sont moins publiées, recensées dans les médias, ou honorées de bourses ou de prix que leurs homologues masculins. «Un biais sexiste intervient à plusieurs maillons de la chaîne.»

Avant de publier un livre, il faut évidemment apprendre à lire et à écrire. Or, l’écriture est arrivée assez tard dans notre histoire, explique Hetty Roessingh, de l’Université de Calgary, soit il y a environ 5 000 ans. «Elle nécessitait une prise de conscience qu’un outil tenu avec la main peut servir à conserver des pensées et à les partager dans le temps et l’espace.» Or, tout se passe lors des 2000 premiers jours de notre vie. Nous établissons des réseaux de circuits neuronaux qui permettent le développement de la littératie. «Tout commence par des doigts agiles!»

Parlons politique maintenant : le professeur Frédérick Guillaume Dufour, de l’UQAM, propose de revenir sur les lendemains de la mise au rancart de la réforme sur l’immigration proposée par la CAQ. Qu’est-ce que cet échec nous révèle sur les nationalismes -car il y en a plusieurs- prônés par la formation au pouvoir à Québec? La crise a mis en relief leurs contradictions, explique-t-il. «Il est prématuré d’évaluer l’impact de cet échec sur l’électorat de la CAQ», mais il en aura un pour sûr dans les instances du parti «où les rapports de forces entre différents camps pourraient évoluer». 

Une enquête réalisée par plusieurs professeurs, dont Michèle Prévost, de Polytechnique Montréal, et des étudiants en journalisme de l’Université Concordia, a montré que les niveaux de plomb dans l’eau de cinq villes canadiennes, dont Montréal, étaient comparables à ceux de Flint, au Michigan, au pire du scandale de l'eau contaminée. «Les résultats sont choquants», écrivent-ils. Les réseaux d’aqueducs vieillissants en sont la principale cause. Les chercheurs exhortent le gouvernement fédéral à garantir de l’eau potable à tous d’ici 2030. «Le manque d’eau potable dans nos villes représente une menace pour la santé publique et mine la confiance.»

Plus on construit de routes, plus elles se remplissent rapidement de voitures. C’est la loi fondamentale de la congestion routière, élaborée il y a plus de 55 ans, explique Fanny Tremblay-Racicot, de l’ENAP. Les routes atteignent les mêmes niveaux de congestion entre cinq et dix ans après la construction de nouvelles voies. Heures perdues, pollution atmosphérique, comment combattre ce fléau? «Pour diminuer le trafic, la seule méthode efficace est la réduction de la capacité routière.» 

Pour maximiser nos chances de survie en tant qu’espèce, notre cerveau nous a appris il y a très longtemps à aimer les aliments sucrés qui nous donnent de l’énergie. Mais nous avons largement dépassé le cap de la survie : les adultes canadiens consomment en moyenne plus du triple de la limite quotidienne de 25 g de sucre ajouté recommandée par l’Organisation mondiale de la santé. Or, ce surplus de sucre a des incidences sur le cerveau, la mémoire et le comportement, explique Amy Reichelt, de l’Université Western. «Bien qu’il ne soit pas facile de briser des habitudes comme celle de s’offrir un dessert après chaque repas ou un café deux crèmes-deux sucres, votre cerveau vous remerciera d’avoir fait des gestes positifs.» 

Haïti est à nouveau secoué, depuis un mois, par des manifestations massives. L’élément déclencheur a été la montée du prix du carburant, mais les manifestants dénoncent surtout la corruption qui gangrène le mandat du président Jovenel Moïse, dont ils réclament la démission. Cette corruption est endémique et son origine remonte à loin, explique Jean-François Savard, de l’ENAP, qui a séjourné trois fois dans ce pays afin de former des fonctionnaires haïtiens. Avec deux doctorants eux-mêmes issus de cette fonction publique, il explique comment elle doit être complètement réinventée : «elle n’est soumise à aucune règle d’imputabilité, ce qui favorise le patronage et, éventuellement, la corruption». 

Enfin, les gilets jaunes ont manifesté pour la première fois il y a un an, et ça n’est pas fini! The Conversation France revient sur ce phénomène dépeint comme désorganisé, hétéroclite, voire radicalisé, mais qui étonne par sa longévité. 

Bonne lecture !

Martine Turenne

Éditrice, La Conversation Canada

À la une

shutterstock.

Littérature : un art encore largement dominé par les hommes

isabelle boisclair, Université de Sherbrooke

Une étude révèle des données révélatrices sur le processus de publication chez les hommes et chez les femmes. Il apparait qu’un biais sexiste intervient à plusieurs maillons de la chaîne.

Les enfants apprennent en explorant le monde avec leurs mains, ce qui leur permet de développer leur motricité fine. Shutterstock

Lire et écrire : tout part des mains

Hetty Roessingh, University of Calgary

L’élégance et la polyvalence inégalées de la main humaine, et ses connexions avec le cerveau, se trouvent derrière la façon dont les humains apprennent à lire et à écrire.

Le premier ministre Francois Legault prend la parole à l'Assemblée nationale, à Québec, le 30 octobre. Le nationalisme de la CAQ est contradictoire. La Presse Canadienne/Jacques Boissinot

Le fiasco de la réforme de l’immigration et les contradictions du nationalisme caquiste

Frédérick Guillaume Dufour, Université du Québec à Montréal (UQAM)

La CAQ mobilise deux types de nationalisme, en contradiction l’un avec l’autre. La crise suscitée par la réforme de l’immigration du ministre Jolin-Barette l’a mis en relief.

Santé Canada impose des normes parmi les plus restrictives au monde sur le plomb, mais elles sont inefficaces sans procédures de tests et un programme de remplacement des canalisations. Shutterstock

Eau contaminée au plomb : comment s’assurer que nos maisons, nos écoles et nos lieux de travail soient sécuritaires

Bruce Lanphear, Simon Fraser University; Marc Edwards, Virginia Tech; Michele Prevost, Polytechnique Montréal

Une enquête a montré que les niveaux de plomb dans l’eau de cinq villes canadiennes étaient comparables à ceux de Flint, au Michigan, pendant la période de pointe de contamination de l’eau.

Montréal est la deuxième ville la plus congestionnée au Canada avec un total de 145 heures perdues per capita dans le trafic à l’heure de pointe, en 2018. Shutterstock

Plus de capacité routière, plus de trafic : il faut revenir à la loi fondamentale de la congestion pour mieux la combattre

Fanny Tremblay-Racicot, École nationale d'administration publique (ENAP)

Pour diminuer le trafic, la seule méthode efficace du côté de la gestion de l'offre de transports est la réduction de la capacité routière, car celle-ci a une incidence sur la demande.

Les adultes canadiens consomment en moyenne plus du triple de la limite quotidienne de 25 g de sucre ajouté recommandée par l’Organisation mondiale de la santé. Shutterstock

Comment notre alimentation trop riche en sucre transforme notre cerveau

Amy Reichelt, Western University

Les Canadiens mangent trop de sucre. Or, la consommation d’aliments riches en sucre a des incidences sur le cerveau, la mémoire et le comportement.

Des manifestants dans les rues de Port-au-Prince, le 22 octobre. Ils dénoncent la corruption qui gangrène le mandat du président Jovenel Moïse, dont ils réclament la démission. AP Photo/Rebecca Blackwell

Crise en Haïti : le salut passe par une administration publique forte

Jean-François Savard, École nationale d'administration publique (ENAP); Emmanuel Sael, École nationale d'administration publique (ENAP); Joseph Jr Clormeus, École nationale d'administration publique (ENAP)

La fonction publique haïtienne n’est soumise à aucune règle d’imputabilité, ce qui favorise le patronage et, éventuellement, la corruption.