Bien des choses se sont passées depuis la mort de Joyce Echaquan au centre hospitalier de Joliette, victime d’un racisme éhonté. Justement, on parle désormais ouvertement de racisme -avec ou sans le mot systémique -, un nouveau ministre responsable des Affaires autochtones a été nommé et une enquête publique a été ordonnée.

Le Conseil des Atikamekw de Manawan, où vivait la jeune mère de famille, lance de son côté une consultation publique en préparation du dépôt, à l’Assemblée nationale, de ce qu’il appelle «le principe de Joyce». Ce principe vise à garantir à tous les autochtones le droit d'avoir accès, sans aucune discrimination, à tous les services de santé et de services sociaux. Cette approche, qui n’est pas nouvelle, repose sur le concept de sécurisation culturelle, comme l’écrit Marie-Claude Tremblay, professeure en médecine familiale de l’Université Laval. «Développée par une infirmière maorie, la sécurisation culturelle est une approche de transformation des soins de santé qui recentre l’attention sur les besoins, les valeurs, les droits et l’identité culturelle des patients autochtones», dit-elle. L’objectif? Démanteler le système colonialisme sous-jacent au système de soins et former le personnel médical à reconnaître les différences culturelles autochtones. «Ces formations doivent permettre aux professionnels de reconnaître l’influence de leur propre culture sur les soins qu’ils donnent, de prendre conscience de leurs privilèges et de leur position de pouvoir dans le système de santé», souligne l’auteure. 

Ce ne sont pas les citoyens les plus populaires au pays. Ceux qu’on appelle les VEC, les «Voyageurs extrémistes canadiens», qui ont rejoint l’État islamique et sont partis faire la guerre en Syrie ou en Irak. Des hommes et des femmes qui ont participé, directement ou non, à des actes de barbarie sans nom. Mais voilà, certains ont fondé des familles. Et c’est le sort des enfants qui inquiète Lydie C. Belporo, de l’École de criminologie de l’Université de Montréal. Comment les États doivent encadrer le retour de ces citoyens problématiques et de leurs familles? 

Le Canada a rapatrié d’un camp syrien l’un de ces enfants, la semaine dernière, la petite Amira, que sa famille torontoise réclamait depuis des mois. Elle est orpheline. Mais que faire lorsque des mères radicalisées souhaitent aussi rentrer avec leurs enfants? Une réflexion doit être menée concernant le rapatriement des VEC adultes et des mesures pénales qui doivent leur être appliquées. «Il serait en effet questionnable de la part d’un pays respectueux des droits humains d’organiser uniquement les retours des orphelins ou d’arracher des enfants à leurs parents au motif qu’ils sont des VEC», écrit Belporo. Pour les mères qui accompagnent ces enfants, le Canada doit aussi développer, estime l'auteure, une stratégie pertinente pour faciliter leur réintégration ou, le cas échéant, leur judiciarisation, si leurs exactions peuvent être prouvées.

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  • Le, ou plutôt les vaccins contre la Covid-19 finiront par arriver dans une clinique près de chez vous. La question n’est pas tant de savoir s’ils seront efficaces, mais s’ils ne viendront pas «mêler» notre système immunitaire en prévision d’une future pandémie, explique Byram W. Bridle, de l’Université de Guelph. Notre première exposition à un agent pathogène, qu’elle se fasse naturellement ou par la vaccination, peut entraîner notre système immunitaire à adopter des mécanismes qui influenceront sa manière de réagir lorsque confronté avec le même agent pathogène, ou un similaire, à un autre moment de notre vie. «Les immunologistes appellent cela «la mémoire immunitaire entraînée». D’où l’importance que le vaccin que l’on recevra activera les bons mécanismes. «Pour une vision à long terme de notre santé, il faut que notre système immunitaire soit entraîné de manière à déclencher une réponse efficace contre de futurs coronavirus hautement pathogènes, dont certains pourraient s’avérer plus dangereux que le virus actuel.» 

Bonne lecture !

Martine Turenne

Éditrice, La Conversation Canada

CP.

Le principe de Joyce : pour une approche de soins sécuritaire et libre de discrimination

Marie-Claude Tremblay, Université Laval

La reconnaissance de l’existence du racisme systémique est nécessaire pour que les Autochtones aient accès à des soins de santé libres de discrimination, tel que le propose le principe de Joyce.

Samira, originaire de Belgique, marche avec son fils au Camp Roj, dans le nord de la Syrie. Son mari français est emprisonné pour des liens avec l'EI. Elle essaie de rentrer en Belgique où elle dit vouloir réintégrer la société. Mais leur rapatriement suscite la controverse. (AP Photo/Maya Alleruzzo)

Rapatriement des enfants de djihadistes : que doit faire le Canada ?

Lydie C. Belporo, Université de Montréal

Après avoir investi d’importants efforts pour la prévention contre l’extrémisme violent, il reste difficile pour les États de gérer la phase post Daech et notamment le retour des anciens combattants.

Un employé inspecte des fioles d’un vaccin contre la Covid-19 produit par SinoVac dans son usine de Pékin le 24 septembre 2020. (AP Photo/Ng Han Guan)

Le futur vaccin contre la Covid-19 doit déclencher une mémoire immunitaire… en vue d’une prochaine pandémie

Byram W. Bridle, University of Guelph; Samira Mubareka, University of Toronto; Shayan Sharif, University of Guelph

Notre exposition à un agent pathogène, que ce soit naturellement ou par la vaccination, peut affecter la manière dont notre système immunitaire réagira à l’avenir à des agents pathogènes similaires.

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